Ma mère, c'est la 18e d'une famille de...
Ma mère, c'est la 18ième. Oui, ma mère est la 18e d'une famille de 20 enfants, oui, 20.
Yep. Mes grands-parents ont eu 20 enfants. Ma grand-maman Minou a accouché 20 fois. 20 FOIS. Et ma mère, ben, c'est la 18e. Dans notre famille, pour organiser un quelconque party, ça prend un comité, car nous devons louer une salle et réserver un traiteur, entre autres. On a déjà loué le camp de vacances Saint-François à l'île d'Orléans. Pour ceux qui ne connaissent pas, c'est un camp de vacances avec tout plein de lits superposés dans des dortoirs, un suuuper grand terrain, une vieille église, pis une cafétéria, tsé. Esti de beau party!
On est tellement de monde dans notre famille que j'ai déjà appelé un de mes cousins «mon'oncle » parce que j'étais juste confuse avec l'âge, si ça faisait de lui mon oncle ou mon cousin... Parfois, je vois un couple dans un de nos partys et je ne sais pas si c'est elle ma cousine ou lui mon cousin. D'ailleurs, je ne me souviens jamais de l'ordre des 20. Je me mélange tout le temps. Je sais juste que ma mère, c'est la 18e. Pis le 19e c'est «Pétard», pis la 20e c'est «ma tante Nan». Après ça, c'est toute mélangé!
Je me souviens aussi d'avoir ri beaucoup dans un cours à l'université quand on étudiait l'impact de l'ordre de naissance des enfants sur la personnalité. On a étudié l'aîné, celui du milieu et le dernier ou la dernière de famille. J'ai ris! J'avais tellement le goût de lever ma main pour demander: «Et les 18e, c'est quoi leurs caractérisques en général? » Mais c'était un cours en anglais pis si je ne savais pas comment être sarcastique en posant une question. On m'aurait sûrement pris au sérieux pis ça aurait été juste ben weird.
Bref, dans une même famille, il y a 12 sœurs et 8 frères, genre 53 petits-enfants, pis à peu près 48 arrière-petits-enfants aussi, de quoi de même, c'est capoté. Y'a 3 Anthony, tsé. Je comprends maintenant pourquoi je suis enceinte en ce moment et que j'ai de la difficulté à trouver un prénom... essaye de trouver un prénom pas pris dans une famille grande de même. Roméo? Rose? Louis? Adèle? Florence? Samuel? Xavier? Roman? Jack? Mia? Chloé? Charly? Charlotte? Justin? Romy? Maya? Olivier? Yep, tous déjà pris, ça fait qu'écrivez-moi pour m'inspirer ;)
Le plus percutant comme souvenir pour moi, à part les énormes biscuits au beurre que grand-maman Minou nous donnait quand on allait la voir, c'était nos partys du jour de l'an, le 1er janvier à midi. C'était un PARTY, littéralement! Sur la scène (parce que oui, il y avait une scène), il y avait Roland (qui ne s'appelait pas Roland, c'était la marque de son piano, mais bon, tsé, enfants, nous autres, on voyait Roland, on l'appelait Roland), qui nous faisait danser sur tous les types de danses en ligne québécoises. De la bouffe, ben d'la danse, des parents qui boivent de l'alcool, des enfants qui courent partout! Des petits spectacles montés par pratiquement chaque famille. Une année, on gagnait même des prix après nos performances, genre les «Brousseau d'Or», quelque chose de même. Et le comité avait créé des petits trophées comme à l'ADISQ, c'était vraiment original! J'avais chanté «Papa bande mou» de Laurent Paquin. Yep, yep, yep. Je trouvais que ça faisait «jour de l'an ». Fuck off Rudolph.
Et ma famille a ri parce qu'ils et elles sont tous et toutes ben cool! Des tablées de cousins et cousines qui rient et qui courent partout. Je me souviens que mes amies du secondaire rêvaient de venir assister à nos jour de l'an. On se faisait courtiser début décembre pour que l'on puisse les amener comme nos chums ou comme nos blondes.
Moé, j'amenais «parsonne ».
Je voulais juste être avec ma cousine Marie-Pier, bon. Celle que je voyais chaque jour au secondaire, certains diront, mais pas grave, je voulais être encore avec elle. Pis Jess, pis San, pis Merlin. Pis Pilou. Pis mes bros. Pis Marlou. Pis voir mes cousines plus vieilles que j'admirais donc... Marie-Ève, Véro, Chantal, Monia, entre autres. J'vous admire d'ailleurs toujours les filles.
Pis après, on s'est fait des chums pis des blondes. Pis eux autres aussi faisaient partie de la famille ben vite. Pis j'avais hâte de les voir, eux autres aussi. Josy pis Stef, entre autres. Tsé, faire partie d'une grande famille, c'est spécial ! Je ne suis pas proche de tout ce monde-là, même que plusieurs, je ne les connais pas beaucoup! Mais on est dans la même famille pareil! On a tous les mêmes grands-parents, ça, personne ne nous enlèvera ça.
Ma maman et ses 11 soeurs se parlent encore. C'est sûr que certaines sont plus proches et que d'autres se parlent moins souvent, mais je pense sincèrement qu'elles s'aiment malgré les différences et la distance. Et chaque année, elles louent un chalet toute la gang (ou presque, dépendant des années). C'est beau, ça! Elles se jasent, parlent fort, dansent, crient, mémèrent, se critiquent sûrement en cachette, mais elles s'aiment. Ces 12 femmes-là se sont aidées toute leur vie! Les plus vieilles ont été les mamans des plus jeunes à certains moments. Les plus jeunes ont reçu 92 000 conseils en même temps des plus vieilles, comme si plein de mamans voulaient leur bien pis leur garrochaient des conseils par la tête en guise de «je t'aime». Ces femmes-là sont extraordinaires. Je les entends parfois parler de forme de corps, de bourrelets, d'amour, d'enfants, d'hommes pis aussi jaser de ce que le monde est devenu pis de comment leurs propres enfants naviguent là-dedans, pis c'est beau. Elles ont toutes des parcours complètement différents. Elles ont toutes vécu de belles affaires pis des affaires rough pis ben tough, mais elles sont encore là, debout, à jaser en pleine santé (avec des ti-bobos parfois aussi, c'est certain, ça arrive, la vie ça écorche... des bobos de l'âme, des bobos de corps).
Ce que je trouve le plus dur dans les dernières années, c'est que ce n'est pas exactement comme dans mes souvenirs, les partys du jour de l'an. Je sais que tout change, pis que ça ne peut pas être toujours comme c'était. Je sais que nos enfants prennent la place et que ça deviendra de plus en plus à leur image. Je sais que nous sommes tous occupés avec nos petites familles qui grandissent et que de moins en moins de monde ont envie de s'occuper du comité (moi comprise), de réserver, de préparer, ça prends du temps! Je sens, et peut-être que je me trompe, que l'on aimerait tous que ce soit comme c'était, mais que l'on ne veut pas y mettre le temps parce que nous avons nos familles. Ça vous arrive, vous aussi, dans vos familles, peu importe sa taille, de sentir que ça change tranquillement?
J'entends souvent aussi, à tort ou à raison, que, quand les grands-parents décèdent, tout change. Peut-être que c'est vrai... Ce sont quand même eux qui rallient les troupes. Je n'ai jamais voulu y croire, mais est-ce que c'est ce qui est en train de se passer? Dans le fond, c'est vrai que, quand quelqu'un arrive dans un groupe ou quitte un groupe, ça change toute la dynamique. Ça serait ridicule de penser que le décès des grands-parents n'aurait pas d'impact sur la famille, quand j'y pense...
Je voulais avoir une réflexion sur les familles en général. Je me suis rarement penchée sur le changement des familles avec le temps. Ce sont des petits deuils, parfois. Ça fait mal, ça fait peur. Nous autres aussi, dans notre petit noyau, nos Noël ont évoluées. Mes parents ont troqué les cadeaux de Noël pour un chalet familial pendant l'été. À Noël, on dort tous à la maison de mes parents, tout le monde ensemble. Christie que c'est écoeurant! J'adore le chalet, j'adore ces moments-là où l'on partage toute la 'tite famille ensemble. Je me sens vraiment reconnaissante. Vraiment. Parfois le changement c'est pour le bon aussi, sans aucun doute.
Pis pour la grosse famille, je sais qu'à un moment donné, on va se voir de moins en moins. Ben c'est déjà commencé, je sais. Pis je comprends, vous prenez soin de vos petites familles comme je prends soin de la mienne aussi. Mais je vous aime tous, d'un amour dur à expliquer. C'est comme quand tu rencontres un Québécois à l'étranger pis qu'en 2 secondes c'est ton meilleur ami parce que tu te sens connecté juste parce que tu viens de la même place. Ben, c'est ça. Peu importe, vous, grande famille des Brousseau, je suis connectée à vous, pis ça fait du bien de penser à ça. Ça fait du bien de savoir que vous êtes là. Merci Grand-Maman et Grand-Papa Minou pour ce beau cadeau... Je pense à vous très fort, Albert et Ida.